Séisme au Maroc : « On a voulu aller vite mais c’est impossible »… Un an après, le pays se reconstruit doucementSportuneBébés et MamansMinutes Maison
Personne n’imaginait que cette région montagneuse, faite de petits villages isolés, pourrait être touchée. Le 8 septembre 2023, la terre a pourtant tremblé pendant de longues secondes dans le Haut Atlas. Enregistré à une magnitude de 6,9 - un record pour –, ce violent séisme a causé de très lourdes pertes. D’après un bilan des autorités marocaines, et plus de 6.000 blessées. Dans ces montagnes dominant Marrakech, des villages entiers ont été ravagés, laissant des centaines de milliers d’habitants sans toit et privant les enfants d’école.
Déterminé à reconstruire le pays, le gouvernement avait promis d’accompagner sa population tout comme la France. Où en est-on un an après ce tremblement de terre historique ?
« Il y a encore des gens qui ne dorment pas »
Difficile d’avoir une vision globale de la situation. Si les aides financières promises semblent bien avoir été versées, la reconstruction prend plus de temps que prévu. Partout dans les provinces d’Al-Haouz et de Taroudant, les plus sérieusement touchées, de nombreux habitants continuent de survivre sous des tentes. Après un premier hiver froid et un été brûlant, ces populations sinistrées s’impatientent. « Le séisme a été un véritable traumatisme pour tous ceux qui l’ont vécu. Aussi . Il y a encore aujourd’hui des gens qui ne dorment pas », témoigne Amal Zniber, enseignante à la tête .
Un an après, certaines voix critiquent la lenteur de la reconstruction. Les promesses du gouvernement se sont-elles envolées ? Non. Mais les autorités n’avaient sans doute évalué l’ampleur de la tâche et le temps long que prendrait la reconstruction des quelque 65.000 maisons démolies ou fragilisées. « Le séisme a frappé des zones montagneuses qui étaient parfois très isolées. Quand nous sommes intervenus, nous avons dû marcher pendant quatre heures et transporter le matériel à dos d’âne, parce que les routes étaient coupées », se souvient Rabie, coordinateur marocain du Groupe de secours de catastrophe français, .
« Une vraie force des populations »
Après le séisme, l’État marocain a donc dû commencer par dégager les routes pour rétablir l’accès à ces zones reculées où l’habitat traditionnel, fait de terre, a été ravagé. Pendant des mois, il a travaillé à recenser les habitations sinistrées et tenté d’établir une liste des lieux où il pouvait reconstruire. « L’État a déployé des aides pour ceux qui avaient tout perdu. Il a aussi proposé des terrains pour reconstruire. Mais certains villageois n’en voulaient pas. Ils voulaient à tout prix retourner dans leur montagne », témoigne Rabie, manager en restauration et bénévole dans l’aide d’urgence.
« On a aussi vu des habitants qui ne savaient plus de quoi serait fait leur avenir, . Mais j’ai trouvé qu’il y avait une véritable force des populations. L’aide a été bien coordonnée. Quand nous y sommes retournés, les constructions avaient déjà démarré et les stigmates de la catastrophe avaient déjà été enlevés », témoigne Thierry Velu, président fondateur .
Pour accompagner ses habitants, le royaume marocain (1.800 euros) puis un « loyer » mensuel d’environ 200 euros pour se loger. D’autres aides du gouvernement sont venues s’ajouter pour permettre aux locaux de reconstruire. Ces dirhams ont suscité les convoitises de certains habitants peu scrupuleux qui ont tenté de profiter de la situation pour s’enrichir.
Des normes antisismiques plus strictes
Mais l’argent ne fait pas tout. Traumatisé par ce tremblement de terre, le Maroc a refusé de rebâtir à l’identique et a tenu à s’assurer que les parcelles frappées soient assez solides pour supporter des maisons. Un temps long, très long, qui s’accompagne de normes antisismiques beaucoup plus strictes. « On a voulu aller vite mais c’était impossible. Tous nos plans ont dû se conformer aux nouvelles normes. On a dû faire les mêmes fondations en béton que pour un immeuble de dix étages à Casablanca, alors que notre internat n’a que deux étages », raconte Amal Zniber.
La fondatrice de l’ONG Amis des écoles s’arrache depuis le séisme pour que les enfants des zones sinistrées puissent retrouver leur internat. « Quand ils arrivent au collège, les enfants doivent souvent se rendre à la ville. L’internat est essentiel pour les filles et les garçons ». Démolis par le séisme, les bâtiments sont en cours de reconstruction à Asni.
En attendant leur livraison prévue pour 2025, de nombreux adolescents sont accueillis à Marrakech, souvent bien loin de chez eux. « Depuis le tremblement de terre, le gouvernement a mis en place une nouvelle organisation. Les enfants restent six semaines à l’internat et rentrent chez eux une semaine. Mais c’est dur pour eux d’être éloignés si longtemps, surtout pour ceux qui n’ont que 11 ou 12 ans ».
Une grosse pénurie de maçons
Son ONG a rapidement entrepris de reconstruire un internat de 500 places pour les garçons, et un autre de 500 places pour les filles. Mais la fondatrice a dû apprendre la patience. Car en durcissant les normes de construction, le Maroc a malgré lui causé une pénurie de main-d’œuvre dans le secteur du bâtiment. « On a eu de gros soucis pour trouver des maçons parce qu’ils étaient tous pris ! Ils ont du boulot partout ! Il y en a qui ont fait venir des artisans de Casablanca, mais ce n’est pas le même prix. Tous ceux qui n’ont pas les moyens doivent donc attendre », reconnaît Amal Zniber.
Bon nombre d’habitants de villages reculés, habitués à la construction traditionnelle doivent en plus se plier à la nécessité de renforcer leur habitat avec du béton. Une denrée pas simple à acheminer dans des zones aussi reculées. Et tous ceux qui connaissent le territoire savent qu’il faudra bien plus d’une année au Maroc pour se relever.