Election américaine 2024 : En Arizona, le droit aux armes à feu en ligne de mireSportuneBébés et MamansMinutes Maison
«Si quelqu’un entre chez moi par effraction, il se fera descendre », assurait le 19 septembre face à . Avant d’ajouter, dans un rire reconnaissable entre mille : « je n’aurais peut-être pas dû dire ça ». Mais derrière ce sourire, la vice-présidente avait certainement millimétré cette annonce. Car la démocrate est régulièrement accusée, notamment par la National Rifle Association of America (la ), le puissant lobby des , d’être une adversaire du Second amendement. C’est lui qui donne le droit à tous les Américains de posséder une arme à feu, dans un pays où 393 millions d’armes à feu sont en circulation, soit plus de 120,5 armes pour 100 habitants.
Donald Trump, soutenu par le lobby des armes à feu, ne cesse de répéter que si elle est élue, la démocrate « retirera leurs armes aux Américains ». Une menace qui fait pâlir de nombreux citoyens des Etats-Unis. En particulier dans . Dans ce « swing state », qui peut basculer du côté démocrate ou républicain selon les élections, les armes sont une véritable religion. Oui, plus encore que dans le reste des Etats-Unis, où l’adage « in Guns we trust » est presque aussi important que « in God we trust ».
Des lois « exceptionnellement laxistes »
Dans l’Etat du Grand canyon, nul besoin de permis pour porter une arme, même visible. Il n’est donc pas rare de faire la queue pour un délicieux hot-dog Sonoran, spécialité du coin, à côté d’un anonyme ostensiblement armé. « L’Arizona est l’un des États où les lois sur les armes sont les plus permissives. Il est noté F par le Giffords Law Center [le score le plus bas possible], un groupe de pression pour la réglementation » des armes à feu, analyse David Combeau, spécialiste des États-Unis et auteur de Des Américains et des armes à feu : Démocratie et violence aux Etats-Unis.
« Les lois sont exceptionnellement laxistes en Arizona », abonde Alex Young, professeur à l’université de l’Arizona. Et elles pourraient encore s’assouplir. « Les républicains, qui contrôlent la législature d’État, ont cherché à autoriser les armes à feu sur les campus de nos universités publiques », explique le spécialiste de la culture des armes aux Etats-Unis. Près de la moitié des adultes possèdent une arme à feu dans cet Etat perpétuellement ensoleillé et frontalier du ,.
Le paradis des milices armées
Le long de la frontière américano-mexicaine de l’Arizona, justement, il n’est pas rare de croiser des groupes paramilitaires antimigrants, en patrouille, armés jusqu’aux dents. En 2016, le journaliste Shane Bauer des Three Percent United Patriots, dont l’objectif affiché était de « chasser les Mexicains », munis d’armes de guerre. Ces milices armées sont moins fréquentes de l’autre côté du spectre politique, mais elles commencent à émerger ces dernières années. Il existe ainsi une antenne du Redneck Revolt, un groupe antifasciste et anticapitaliste qui porte ouvertement des armes, à Phoenix, la principale ville de l’Arizona. C’est une ramification du John Brown Gun Club, dont les membres sont sur la photographie d’illustration de cet article.
Généralement associée à la droite, la question des armes à feu est donc plus complexe qu’il n’y paraît, outre-Atlantique. « De nombreux Américains de tous bords politiques, de toutes origines géographiques, de tous sexes, de toutes orientations sexuelles, de toutes couleurs et de toutes croyances possèdent des armes à feu », assure David Yamane, professeur de sociologie à l’université de Wake Forest et auteur de Gun Curious : A Liberal Professor’s Surprising Journey Inside America’s Gun Culture. « Et les nouveaux propriétaires d’armes à feu – notamment depuis 2020 – se diversifient particulièrement. Donc, nous ne devrions pas être surpris que Kamala Harris, une femme métisse de gauche et de , possède une arme. Pas plus que nous ne devrions être surpris qu’un professeur de sociologie américain d’origine asiatique, de gauche et de , possède des armes à feu », souligne-t-il en référence à son cas personnel.
« Certains Américains peuvent se décider dans l’isoloir sur cet unique point »
« Le droit de posséder une arme est un élément central de l’identité régionale de nombreux habitants de l’Arizona, en particulier des républicains. Il n’est pas rare de voir des véhicules circuler sur les autoroutes de l’Etat avec le Second amendement inscrit sur leurs vitres arrière », illustre Alex Young. Pour beaucoup d’Américains, « l’accès libre aux armes constitue un symbole de l’équilibre des pouvoirs entre l’Etat, surtout fédéral, et les citoyens. Ceux-ci, en possédant des armes, ont la possibilité de les prendre contre un gouvernement qui serait devenu tyrannique », explique David Combeau. Avant d’ajouter : « Et comment sait-on qu’un gouvernement devient tyrannique ? Lorsqu’il se met en tête de contrôler les armes… » Dans ces circonstances, le sujet est forcément explosif pour les candidats à la . Car, l’assure David Combeau, « certains Américains peuvent se décider dans l’isoloir sur cet unique point ».
La déclaration de Kamala Harris, se présentant comme une propriétaire d’arme à feu capable de se défendre en cas d’intrusion, est « très chargée politiquement », concède David Yamane. Et, ajoute-t-il, c’est une « stratégie pour détourner les critiques de ses adversaires politiques qui la présente comme anti armes à feu ». Une tactique particulièrement sensée en , où le droit à l’autodéfense est essentiel et où chaque voix compte. n’avait devancé que d’une courte tête en 2020, avec moins de 20.000 voix d’avance.