Procès des viols de Mazan : « On ne nous incite pas à y penser »… La soumission chimique, dure à détecter pour les soignantsSportuneBébés et MamansMinutes Maison

Une fatigue continue, des pertes de mémoire fréquentes et des douleurs gynécologiques inexpliquées. Ces symptômes étaient ceux de . La sexagénaire a été victime de soumission chimique, , alors son mari, afin de la violer et de . Le procès, retentissant, s’est ouvert au début du mois à Avignon et doit prendre fin en décembre.

Pendant des années, Gisèle Pelicot a multiplié les rendez-vous chez différents spécialistes. Soupçonnant un début d’, les médecins auraient-ils pu reconnaître la vraie raison de ses symptômes - une soumission chimique infligée par son ex-mari ? Ce mode opératoire, qui consiste à droguer une personne à son insu pour commettre un crime ou un délit (majoritairement des violences sexuelles), reste peu connu des professionnels de santé.

« Moi non plus, je n’aurais pas pensé à la soumission chimique »

La gynécologue Ghada Hatem le reconnaît : « moi non plus, je n’aurais pas pensé à la . Si on m’amène une dame âgée avec des troubles de mémoire, je ne penserais pas d’abord à cela. » Pourtant, la médecin est coutumière des faits de violences. Elle a fondé la Maison des femmes à Saint-Denis pour en accueillir les victimes.

« La soumission chimique est une question qui nous met en difficulté car il s’agit de signes peu spécifiques et discrets, poursuit Lucie Bosméan, médecin généraliste exerçant dans une Maison des femmes en Isère. En médecine, on divise les personnes en organes et les organes en maladie, sauf que la question des violences nécessite une vision globale. » La généraliste a la puce à l’oreille lorsqu’un symptôme se répète, comme des mycoses, sans explication médicale. « Très souvent, il s’agit de signaux faibles de violences. » Pour Leila Chaouachi, docteure, pharmacienne au centre d’addictovigilance de Paris et experte de l’enquête nationale sur la soumission chimique de l’ANSM, « une fois qu’on a écarté toutes les autres pistes possibles, il va falloir penser à la soumission chimique ». Mais pour avoir cet espace d’écoute, il faut du temps… et les médecins en manquent cruellement.

« On ne nous incite pas à y penser »

Et pour penser à la , faut-il encore la connaître. Pour beaucoup de gens, elle se résume au GHB glissé dans un verre en boîte de nuit. Mais cela ne reflète , la majorité ayant cours au sein de la cellule familiale et étant pratiquée à l’aide de médicaments présents dans de nombreuses armoires à pharmacie. « On est déjà peu formés aux questions de violences, alors la soumission chimique ! », explique Lucie Bosméan. « On ne nous incite pas à y penser », résume Ghada Hatem.

Et puis, comment penser l’impensable ? « Quand on n’est pas éduqué au fait que les familles font des choses horribles, jamais on n’y penserait », rappelle la médecin. Pourtant, elle insiste : n’importe qui peut être concerné. « Un médecin de famille peut se dire “ce n’est pas possible, je le connais bien, il est très sympa”. On a tous des biais. » La spécialiste reconnaît également la difficulté à aborder la question avec des patients. D’où l’importance d’être formé à la détection, mais aussi à l’écoute et à l’accompagnement des victimes.

Savoir détecter, mais aussi écouter et diriger

« Seule la moitié des victimes ont des amnésies, donc l’autre moitié se souvient de ce qu’il s’est passé, insiste Leila Chaouachi. Et parmi celles ayant des amnésies, la majorité a des indices comme des flash-back ou des signes de violences possibles comme un réveil dénudée, un écoulement du vagin ou un préservatif usagé qu’on ne se souvient pas avoir utilisé. » Pour la docteure en pharmacie, le professionnel doit l’orienter vers les structures spécialisées pour l’aider à gagner une course contre la montre.

Car en matière de soumission, le temps est précieux. Les molécules utilisées . Passé ce temps, il sera plus difficile de prouver la soumission.

Des formations pour les soignants

« Les victimes peuvent aussi bien pousser la porte des urgences que consulter leur médecin traitant ou voir un pharmacien, donc tous les professionnels doivent être formés », insiste Leila Chaouachi. Dans ce but, Lucie Bosméan, âgée d’une trentaine d’années, a effectué un diplôme universitaire « violences faites aux femmes ». « J’ai fait cette formation de deux semaines de ma propre initiative et je l’ai payée avec mon petit salaire d’interne. Cela demande un investissement en termes de temps, de finances et d’énergie. On ne peut pas demander à tous les médecins d’avoir ce niveau d’engagement. »

Pour pallier ce manque de connaissance, les trois professionnelles interrogées dispensent des formations destinées principalement aux professionnels de santé. Sages-femmes, infirmières, médecins, pharmaciennes et éducatrices assistent à des conférences d’une heure à un jour, selon les demandes. Parmi l’audience, une écrasante majorité de femmes.

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