« On nous a empoisonnées »… Le combat d’une ex-fleuriste pour sa fille, fauchée à 11 ans à cause des pesticidesSportuneBébés et MamansMinutes Maison
Elle vouait un amour débordant pour . Une passion dont elle avait fait son métier, sans penser un seul instant que cette profession de fleuriste finirait par empoisonner et tuer sa fille chérie. Voilà deux ans et demi que Laure Marivain, son mari et leurs deux autres enfants pleurent la mort de leur petite Emmy, foudroyée par une leucémie aiguë lymphoblastique. « Elle ne demandait qu’à vivre mais à seulement 11 ans, elle a déployé ses plus belles ailes le 11 mars 2022 à 18h02 pour s’envoler vers un monde sans douleur », témoigne sa mère.
Car pendant sept ans, la fillette pleine de vie « a porté sur son dos le fardeau » et connu « la torture ». La grossesse de Laure Marivain et l’accouchement avaient certes été difficiles, mais sans que cela n’inquiète outre mesure le corps médical. Vers l’âge de 4 ans, l’état de santé de la fillette s’est pourtant sérieusement dégradé avec des signes inquiétants de fatigue et des douleurs osseuses. Le verdict médical tombera finalement le 16 janvier 2015 avec du sang diagnostiqué chez l’enfant. « Emmy a tout de suite compris la gravité et prononcé ses mots : N’ayez pas peur, je vais me battre », raconte sa maman.
Un quotidien fait de douleurs et de soins pour la fillette
Plongée « dans l’enfer et la tourmente », la famille Marivain, installée dans la région nantaise, questionne alors les médecins pour tenter de comprendre l’origine du mal qui ronge leur fille. « Le hasard ou la faute à pas de chance », leur répondront maladroitement les spécialistes. S’ensuivent alors des années de souffrance pour la jeune Emmy qui « a subi des milliers d’actes médicaux en tous genres ». Celle qui aimait la danse et les balades à cheval voit son quotidien rythmé par les prélèvements sanguins, les séances, les ponctions ou les chirurgies.
Un lourd parcours de soins qui laisse peu de répit au corps frêle de la fillette et lui plombe le moral. « Elle changeait physiquement pour son plus grand désespoir, confie sa mère. Elle grossissait, gonflée par les corticoïdes, puis devenait ensuite squelettique et devait être nourrie par une sonde naso-gastrique. Elle perdait aussi très souvent ses cheveux, c’était tellement horrible pour elle qu’il fallait que je les conserve car elle souhaitait ne pas oublier leur beauté ».
Des fleurs imprégnées de résidus de pesticides
Pendant que l’état de santé de sa fille empire, Laure Marivain commence à mener sa propre enquête, soupçonnant que son métier de fleuriste y était peut-être pour quelque chose. Sidérée, elle découvre alors la face cachée du monde horticole avec des fleurs venues du Kenya ou d’Equateur imprégnées de résidus . Une étude publiée en 2019 en détectera plus d’une centaine, dont la plupart interdits dans l’Union européenne, dans les bouquets de fleurs les plus vendus. « On les touchait et on les manipulait à longueur de journée sans aucune protection car rien n’était visible sur les mains, assure l’ancienne fleuriste. Alors qu’en fait, on nous empoisonnait à petit feu sans qu’on en sache rien ».
Dans son combat, Laure Marivain reçoit le soutien qui lui conseille de saisir le Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides. Elle le fera quelques jours après le décès brutal d’Emmy. « Je lui ai fait la promesse de me battre pour elle et de faire savoir au monde ce qu’on lui a fait subir, assure-t-elle. Car ce n’est pas normal que l’on laisse nos enfants mourir de cancers ou d’autres maladies à cause des pesticides ».
Rongée par la culpabilité d’avoir « empoisonné sa fille »
En 2023, le FIVP a reconnu « le lien de causalité entre la pathologie d’Emmy et son exposition aux pesticides », une première pour un enfant décédé. On propose alors une somme forfaitaire de 25.000 euros chacun aux deux parents pour le préjudice subi. Une indemnisation que le couple contestait ce mercredi après-midi devant la 9e chambre du pôle social de la Cour d’appel de Rennes. « Cela signifierait donc qu’Emmy ainsi que tous les autres membres de la famille n’ont subi aucun préjudice, c’est insupportable et intolérable », a plaidé Maître François Lafforgue, l’avocat de la famille, réclamant « une réparation intégrale ».
Rongée par la culpabilité d’avoir « empoisonné sa fille » pendant sa grossesse, Laure Marivain a également défendu l’honneur d’Emmy dans une lettre bouleversante lue lors de l’audience. « On l’a privée de sa vie et réduite au silence, on ne peut pas en plus la priver de ses droits », a-t-elle lâché des sanglots dans la voix, dénonçant « un véritable scandale sanitaire ».
L’avocate du fonds d’indemnisation des victimes des pesticides a de son côté assuré que ce fonds « ne pouvait intervenir que dans la limite de ces pouvoirs » et ne pouvait donc « réparer intégralement le préjudice ». La décision a été mise en délibéré au 4 décembre.