Médecine alternative : C’est quoi la kinésiologie, cette pratique dans laquelle Laure Manaudou veut se reconvertir ?SportuneBébés et MamansMinutes Maison
On l’a connue nageuse et médaillée olympique. On l’a découverte en pâtissière aguerrie dans « Le meilleur pâtissier, chefs et célébrités », et appréciée en commentatrice de talent lors des épreuves de natation des de Paris. Mais compte à présent embrasser une toute nouvelle carrière : kinésiologue. « J’ai terminé mon cursus d’une formation de kinésiologie, j’ai validé mes 600 heures de stage, il ne me reste plus qu’à passer la certification », confiait-elle il y a quelques jours à .
Un projet de reconversion qui en laisse beaucoup perplexes. Pourquoi ? Parce que la kinésiologie, est une discipline controversée, au cœur d’affaires polémiques et mise en cause par la (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), l’observatoire des dérives sectaires. Mais qu’est-ce que la kinésiologie au juste ? En quoi consiste-t-elle ? Et quels sont les risques qui lui sont associés ? 20 Minutes vous explique.
Kinésiologie et kinésiologies
Si cela commence pareil, la kinésiologie, peu connue, n’a rien à voir avec la kinésithérapie. D’ailleurs, le conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes « ne reconnaît pas la "kinésiologie" comme une qualification, un diplôme, un titre, un grade, une fonction, une spécificité ou une spécialité de la masso- ». Fondée dans les années 1960 par un chiropracteur américain, le Dr George Goodheart, la kinésiologie est une méthode de thérapie holistique inspirée par la médecine chinoise. Mais elle « n’est ni une médecine ni une thérapie et n’a aucun désir de l’être, indique le s (SNK). Elle laisse aux médecins et aux spécialistes le soin de traiter les malades et leurs maladies. La kinésiologie travaille en amont, sur la santé et le bien-être de l’individu et s’envisage comme une approche éducative et préventive ».
Et avec plusieurs courants de pensée et d’exercice, la kinésiologie regrouperait des kinésiologies différentes. Ainsi, il existe d’une part la « kinésiologie appliquée professionnelle », et la « kinésiologie énergétique », explique , qui s’est penché sur la question. La première « est organisée au niveau international et réservée aux professionnels de santé (chiropracteur, dentiste, médecin, ostéopathe), elle ne compte que quelques dizaines de praticiens en France. Elle est conçue comme un outil auquel le professionnel de santé peut avoir recours dans le champ de compétence qui est le sien ». Pour quelles applications pratiques ? « Les indications revendiquées sont notamment les perturbations du système neuro-musculo-squelettique, mais également certains troubles fonctionnels, les et intolérances alimentaires, certains désordres hormonaux, les chocs émotionnels », répond l’Inserm.
Il existe aussi la kinésiologie énergétique qui, elle, est « bien plus représentée en France, poursuit l’Inserm. Elle n’est pas réservée aux professionnels de santé, et regroupe un ensemble de pratiques comme la "santé par le toucher", la "kinésiologie éducative", le "concept trois en un" ». Selon le SNK, « la kinésiologie énergétique couvre ainsi de larges domaines d’application : professionnels, familiaux, personnels, sportifs, éducatifs, etc. ». Sans oublier les déclinaisons plus ésotériques de cette matière, telles que « l’astrologie kinésiologique ».
Polémiques et dérives sectaires
Mais comment se déroule la prise en charge par un kinésiologue ? En pratique, cela commence toujours de la même manière : « Cette technique psycho corporelle recourt à un test musculaire de communication au plan physique et émotionnel, décrit la Miviludes. Proposée à tous les âges de la vie et à tous publics, elle permettrait aux usagers de la méthode d’optimiser le capital "ressources personnelles" avec l’accompagnement d’un thérapeute, et de parvenir à l’auto-guérison des difficultés existentielles et des ».
Une approche holistique et spirituo-philosophique du bien-être physique et mental sans fondement médical qui inquiète le : « Le risque essentiel est d’écarter les patients présentant des pathologies graves des traitements dont l’efficacité a été démontrée, ce qui peut entraîner une perte de chance ou un risque vital pour ces patients ». En outre, ajoute l’observatoire des dérives sectaires, « les thèses développées par ces pseudo-thérapeutes s’appuient sur une approche "psychologisante" reposant sur trois postulats : la culpabilité du patient dans le développement de sa maladie ou de son mal-être, l’angoisse de la maladie et la revendication d’un mieux-être dans une société individualiste et matérialiste ». Un champ où sévissent des « thérapeutes individuels auto proclamés à l’issue de formations non homologuées aux contenus, durée et coûts divers », et qui « soumet à l’emprise mentale celui qui y adhère, et le met en danger » potentiellement, s’inquiète la Miviludes.
Car le problème, c’est que les adeptes de la kinésiologie, mouvance née dans le sillage du New Age, « prônent de manière plus ou moins radicale la rupture avec des habitudes de vie jugées néfastes, au profit de choix naturels et authentiques comme l’alimentation biologique, les médecines douces, les thérapies non médicamenteuses ou encore », relève la Miviludes. Or, poursuit l’observatoire des dérives sectaires, « la radicalisation de certains adeptes de cette mouvance a conduit à des dérives à caractère sectaire ».
Dérives vers la privation de soins
Et dans les faits, les croyances de certains adeptes de la kinésiologie ont mené à des drames, comme dans par la Cour d’assises de Quimper, rappelle la Miviludes : « des parents, au nom de conceptions idéologiques inhérentes à la pratique de la kinésiologie avaient adopté pour eux-mêmes et leurs enfants le dans leur quête d’une alimentation purifiée. Cette alimentation carencée en protéines animales et en vitamines et leur extrême défiance à l’égard d’un monde médical jugé a priori dangereux causaient la mort de leur bébé qui, allaité par la mère depuis sa naissance, s’était retrouvé en état de malnutrition majeure ».
Plus récemment, en 2022, ont été reconnus coupable de privation de soins et d’aliments sur leurs deux enfants. Depuis sa naissance fin 2020, la plus jeune des deux filles du couple, tout comme sa grande sœur, était dénutrie, au point d’en mourir en avril 2022.
Nul ne sait pour l’heure vers quelle application de la kinésiologie Laure Manaudou compte s’orienter. En revanche, dans son rapport d’évaluation publié en 2017, rappelle que, « concernant l’efficacité de ces pratiques, il n’existe que très peu d’essais contrôlés randomisés, ne permettant pas à ce jour de conclure quant à l’efficacité de la kinésiologie ».