Les Françaises boivent-elles de l’alcool durant la grossesse, comme le suggère « Emily in Paris » ?SportuneBébés et MamansMinutes Maison
La série Emily in Paris n’en finit plus de . Si les Parisiennes ne se baladent ni affublées d’un (si vous en voyez dans la capitale, il s’agit assurément étrangères), ni avec une baguette sous le bras, elles ne sifflent pas non plus coupes de champagne et verres de vin quand elles sont enceintes.
C’est pourtant ce que laisse à penser l’épisode 3 de la saison 4, dans lequel (on ne vous spoile pas l’intrigue, rassurez-vous) Emily passe la soirée avec Mindy dans un bar branché, et s’étonne à la fois du manque de succès en France des (c’est faux, ), et de voir deux femmes enceintes (à un stade bien avancé de leur grossesse) siffler gaiement un verre de vin rouge. Comme s’il était de coutume pour les Françaises enceintes de boire de l’alcool en toute décontraction. Une représentation à mille lieues de la réalité puisque dans la vraie vie, les autorités sanitaires françaises défendent un principe : pas une goutte d’alcool durant la grossesse. Et qu’elles sont à pied d’œuvre pour sensibiliser les futures mères aux dangers de l’alcoolisation fœtale.
Le principe : Zéro alcool pendant toute la grossesse
Si le sujet est abordé avec une légèreté déconcertante (et fausse) dans la série américaine, en France, les autorités sanitaires prennent très au sérieux la question de la consommation d’alcool durant la grossesse. Ainsi, le ministère de la Santé a édité un guide sur cette problématique destinée aux professionnels de santé. « Toutes les femmes doivent recevoir un message clair, cohérent et identique de la part des professionnels de santé : recommandation "". En effet, il n’y a pas de seuil de consommation d’alcool sans danger pour les femmes enceintes ou prévoyant de l’être ».
La consommation d’alcool pendant la grossesse constituant « un important problème de santé publique, le ministère chargé de la Santé a adopté une stratégie de lutte reposant sur diverses mesures », dont des campagnes d’information relayées par l’ensemble des autorités sanitaires, de l’ aux agences régionales de santé (ARS), en passant par les associations. Ainsi, depuis un arrêté de 2006, « un pictogramme figure sur tous les conditionnements d’alcool pour rappeler les risques liés à sa consommation pendant la grossesse », rappelle . Il représente une femme enceinte buvant un verre d’alcool, dans un rond rouge barré. Il peut également être accompagné de la mention : « La consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse, même en faible quantité, peut avoir des conséquences graves sur la santé de l’enfant ».
Car si en temps normal, les experts internationaux estiment le seuil de consommation à risque pour les femmes à 14 verres standards par semaine pour un usage régulier, soit 2 verres standards par jour en moyenne, ce seuil « n’est pas valable lors de situations physiologiques particulières comme la grossesse », insiste le ministère de la Santé.
Des risques pour l’enfant à naître
Ce mot d’ordre « zéro alcool pendant toute la grossesse », c’est parce que « quelle que soit la dose bue, l’alcool ingéré par une femme enceinte passe presque intégralement dans le sang du fœtus à travers le placenta, explique l’Assurance maladie. Or, l’alcool a un effet tératogène », c’est-à-dire qu’il entraîne un risque de malformations « en période embryonnaire (les trois premiers mois de la grossesse) et neurotoxique sur le cerveau du fœtus tout au long de ».
Une consommation qui peut alors « avoir des effets irréversibles sur le bébé. Le plus souvent, lorsque la consommation d’alcool est modérée, il s’agit de troubles des apprentissages », qui peuvent affecter « l’écriture, la lecture ou encore la motricité fine », poursuit l’Assurance maladie. Ainsi que « l’adaptation et le comportement (hyperactivité, agressivité, etc.), appelés troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF) ».
De son côté, la (Mildeca) appelle elle aussi à « protéger l’enfant de l’exposition aux substances psychoactives. 738.000 enfants sont nés en France en 2021 », rappelle-t-elle. Et dans le détail, les chiffres sont inquiétants : « 1 sur 1.000 est né avec un syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) complet, et 1 sur 100 souffre ou souffrira de TCAF directement liés à la consommation d’alcool durant la grossesse ». Des troubles qui exposent aussi à une plus « grande vulnérabilité au risque d’addiction au cours de la vie ».
Prévenir le syndrome d’alcoolisation fœtale
Et les chiffres sont conséquents. A ce jour, en France, « près de 500.000 personnes vivraient avec des symptômes variés liés à la consommation d’alcool de leur mère au cours de la grossesse, détaille la Mildeca. La consommation d’alcool pendant la grossesse représente ainsi la première cause de handicap mental non génétique et d’inadaptation sociale de l’enfant en France ». Et « chaque année, 15.000 enfants naissent avec des troubles causés par l’alcoolisation fœtale en France », précise , qui lutte contre le SAF, qui « constitue la forme la plus sévère des conséquences de la consommation d’alcool pendant la grossesse », alerte-t-elle. Un syndrome qui provoque « retard de croissance, retard psychomoteur, des malformations du visage, et des troubles cognitifs majeurs avec parfois une déficience intellectuelle ».
Or, « 27 % des Françaises admettent consommer de l’alcool pendant leur grossesse, et ce chiffre monte à 37 % pour la région Île-de-France », selon une étude Opinion Way pour SAF France publiée en septembre 2023 à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les , qui a lieu chaque année le 9 septembre. Mais les chiffres s’améliorent : selon Santé publique France, « la recommandation du repère "zéro alcool pendant la grossesse" s’est progressivement installée dans les représentations du public : 90 % des personnes interrogées la connaissent en 2020 (+ 10 points entre 2004 et 2020). Et la proportion des personnes qui déclarent qu’un verre pour les grandes occasions ne comporte pas de risque a été divisée par deux entre 2004 et 2020 (48 % vs 25 %) ». Une amélioration, mais qui résonne aussi comme un avertissement à ne pas relâcher la vigilance face aux addictions durant la grossesse.
Pour les futures mères chez qui la consommation d’alcool pourrait représenter un problème, des sont ouvertes dans de nombreuses maternités. Il est ainsi possible, précise la HAS, de leur aménager « un parcours de soins spécifique avec une prise en soin protocolisée ».